L’homme inflige au vivant une « violence lente ». Les forêts perdent du terrain, le fond des océans s’asphyxie en silence, les bêtes meurent sans tambour. C’est l’histoire de la grenouille dans une casserole à feu doux, qui se retrouve bouillie avant de s’en rendre compte. Nos cauchemars de fin du monde, nos apocalypses en cinémascope ont du mal à rendre compte de ce désastre à bas bruit.
Sous le brouhaha de la pandémie qui occupe tous les écrans, ce tout nouveau festival voudrait faire entendre le murmure du monde. Il voudrait en amplifier les conversations à voix basse, les aveux, la rumeur têtue, les signaux de détresse, les refrains tristes ou tendres. Contre la torture lente et la mort incognito, il voudrait jouer la vie en douce — le bruit de l’herbe qui pousse, la poussière des jardins publics, le bulletin des oiseaux, la rumeur au loin des voitures, l’insecte qui mâche le bois, les doigts fins du vent épuçant les branches. Contre la pyrotechnie des scénarios catastrophe, jouer l’enchantement du monde d’à côté et la magie simple du vivant.
Jean-Christophe Cavallin, écrivain, professeur de littérature, directeur du master écopoétique et création